L’Escargot de Forêt

Posted: 31st March 2012 by admin in Nature, Préaux
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C’est ainsi qu’on l’appelle ici, dans ce coin de Normandie, mais en réalité ce n’est rien d’autre que l’escargot de Bourgogne (Helix pomatia). Pas la peine de le rechercher dans les champs ou dans les jardins, hormis quelques rares endroits où il a survécu aux pesticides, anti-limaces et autres traitements chimiques utilisés à profusion par les jardiniers amateurs et par l’agriculture. Ici, pour le rencontrer, il faudra plutôt aller se promener en forêt où il a trouvé refuge.

Il y a une bonne dizaine d’années je l’ai réintroduit dans mon jardin. N’utilisant que très rarement de produits chimiques et privilégiant un couvert végétal assez dense, comportant de nombreuses plantes naturelles, j’ai pensé que ce nouvel habitat pourrait lui convenir. Ça a marché. Les escargots s’y sont en partie adaptés et reproduits. Il y a eu bien entendu des pertes, et bien qu’en petit nombre, il a, depuis, colonisé les espaces et jardins voisins.

Un escargot de forêt peut vivre assez longtemps, quinze, voire vingt ans. Il s’accouple, creuse le sol en juin ou juillet pour pondre ses œufs qui donneront de petits escargots trois ou quatre semaines plus tard. Plus fragile et moins prolifique que le petit-gris (Helix aspersa) qui lui, reste assez commun dans nos jardins, notre escargot de forêt devra encore passer par bien des épreuves avant d’atteindre la taille adulte qui le protègera des prédateurs.

Les grives font chaque année dans notre jardin un vrai carnage. La population de petit-gris chute en flèche, celle des jeunes escargots de forêt également. Les coquilles éclatées parsèment alors les allées maçonnées. Il ne faut guère de temps à une grive pour briser une coquille en la tapant sur le sol. Il y a également ce gros hérisson qui installe son nid chaque année dans un massif ou bien dans la haie. Lui aussi en prend sa part, et vu sa taille et son embonpoint, il doit trouver largement dans notre jardin ce dont il a besoin.

En fin de compte, peu de jeunes escargots de forêt atteignent la taille adulte. En vieillissant ils prendront au fil des ans une teinte blanchâtre qui désigne je pense les spécimens les plus âgés. Contrairement au petit-gris qui est actif principalement la nuit, l’escargot de forêt, ayant moins besoin de se protéger une fois adulte, se déplace et se nourrit également le jour, aussi peut-on l’observer fréquemment dans son habitat.

Les escargots de forêt se nourrissent de plantes, mais aussi de déchets et débris de végétaux. A plusieurs reprises il m’est arrivé d’en retrouver rassemblés, festoyant de débris de tontes pourrissant au pied des haies.

Quand il commence à faire trop froid les escargots s’enterrent ou se mettent à l’abri au pied d’une plante. Ils secrètent un mucus qui en séchant durcira et obturera leur coquille, les protègera de la déshydratation. C’est ce que l’on nomme l’épiphragme. Sur la dernière photographie faite ce mois-ci, lorsque, à moitié enterrés sur le dos, les escargots sont encore endormis, on voit sans difficulté cet épiphragme de couleur blanche.

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Le cimetière s’étendait autrefois autour de l’église, mais au milieu du XIXe siècle, par ce manque de place qui fit toujours cruellement défaut dans les petits cimetières de villages, pour une meilleure hygiène aussi, on décida de le transporter à l’écart des habitations. Le conseil municipal choisit et acheta une parcelle de verger qui appartenait autrefois, avant la Révolution, à la cure de Préaux. Eugène Barthélemy, l’architecte diocésain bien connu à cette époque, se chargea d’en dessiner l’aménagement.

Il faut se diriger vers le fond du cimetière, c’est là que se tiennent rassemblés la plupart des monuments funéraires du XIXe siècle et du début du siècle suivant. L’intérêt de cette partie du cimetière réside aujourd’hui dans la conservation de son caractère ancien. Le peu d’installations de tombes modernes, un mitage presque inexistant, lui ont gardé globalement l’apparence qu’elle montrait dans les années 20 ou 30. Cela ne durera pas. Nombre de ces tombes disparaîtront dans les années qui viennent, la commune ayant besoin de faire de la place pour ses nouveaux locataires.

Relique d’un âge perdu, ce patrimoine auquel on ne porte habituellement qu’assez peu d’attention a pris une bien triste allure. Pierres tombales brinquebalantes, croix brisées, éclatées par le gel, mobilier disloqué, la vie a emporté les familles au loin, l’oubli a laissé faire le temps. Ici tout se ressemble, tout est gris, de la même pierre. On ne rencontre pas de fleurs, où alors il y a bien longtemps qu’elles furent déposées là, en céramique ou en plastique. Les crucifix eux-mêmes sont souvent identiques. C’est que l’on ne s’adressait guère qu’à la même entreprise de pompes funèbres. Celle-ci avait succédé à la fabrique en 1885, entrainant la liquidation de la confrérie de la Charité, ces charitons qui jusqu’alors accompagnaient les morts jusqu’à leur dernière demeure. Un corbillard tiré par deux chevaux fit dorénavant le service.

Bientôt les notables investirent l’allée centrale plutôt que d’aller se perdre dans le fond du cimetière parmi les petites gens. C’est justement sous la Troisième République qu’ils prirent cette habitude de s’installer là. Étrange idée pour des républicains. L’indienneur Narcisse Hazard, nommé par le pouvoir sous le Second Empire, le médecin Stanislas Jacquelin, premier maire de la Troisième République, son successeur, le cultivateur Delphin Courtois, furent inhumés au milieu des rangées serrées de leurs concitoyens, mais Désiré Simon, le boucher, préféra l’allée. Ne fut-il pas d’ailleurs traité de monarchiste dans une lettre de l’instituteur adressée au préfet ? Ces deux-là ne pouvaient pas se sentir.

Dans l’ancien cimetière, celui qui se tenait autour de l’église, poussaient des arbres, des pommiers qui permettaient à la fabrique de faire un peu d’argent en vendant les récoltes, des sapins quand ce fut la mode, mais ici, dans ce cimetière, rue des Écoles – qui fut en d’autres temps la rue du cimetière –, on ne voit nulle trace de vie hormis celle de mauvaises herbes envahissant les tombes non entretenues. Les cimetières en France sont devenus sinistres et tristes. On n’y aime guère la nature, peut-être la vie tout simplement. Pourtant, pour qui sait observer, prêter attention aux petites choses qui furent laissées intentionnellement sur les tombes, les épitaphes, les symboles, les noms, ce sera l’occasion de retrouver un peu l’histoire de ces quelques habitants qui n’ont pas encore tout-à-fait quitté notre existence.

La colonne tronquée est associée aux tombes des soldats morts sur les champs de bataille de 14-18, de jeunes gens disparus trop tôt d’un accident ou d’une maladie. Elle symbolise la vie trop vite interrompue.L’épitaphe émouvant adressé par un mari à sa jeune femme décédée, ceux, dérisoires, d’un ancien conseiller municipal fier de l’avoir été trente-trois années durant, d’un instituteur comblé par ses fonctions et par sa médaille d’or, au sentiment de devoir accompli, vous transporteront en d’autres temps.

Vous remarquerez ces sépultures identiques, allant par deux, de couples réunis, parfois dissociées par l’absence de l’une des croix, marque d’un choix volontaire – en général celui du mari – à l’époque où se dessinait déjà le divorce entre l’État et l’Église.

Après la Première Guerre Mondiale on commencera à fixer sur certains monuments funéraires les portraits des personnes inhumées. Nombre de ces photographies de visages qui jadis souriaient se sont effacées depuis.

Ce lieu de mémoire somme toute assez banal va disparaître. C’est dommage. Un peu comme si l’on jetait à la décharge les derniers témoignages d’un passé trop ancien. De toute façon il n’y a pas de solution, il faut faire de la place. Le village se développe et si vous habitez Préaux, il faudra bien vous y enterrer un jour ou l’autre à votre tour.

Alors vos proches vous choisiront un monument bien kitch, bien laid, comme c’est l’habitude aujourd’hui, qu’ils installeront sur l’emplacement d’un honorable Sosthène Ridel, d’un Stanislas Jacquelin, médecin héroïque au temps de la vaccine, ou bien encore de l’un de ces soldats de 14-18 sacrifiés par les généraux les plus irresponsables que la France ait jamais produit. Pas grave, vous n’en saurez rien. Et puis dans cent cinquante ans, peut-être beaucoup moins, quelqu’un viendra planter au pied de votre emplacement laissé à l’abandon un petit écriteau blanc portant la mention « Cette sépulture est susceptible d’être reprise, prière de s’adresser à la mairie ». C’est qu’on vous aura tout bonnement oublié.

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Voici un texte sur lequel j’avais travaillé il y a un bout de temps, mais qui visiblement était hors sujet. Dommage.

Entre 1738 et 1744 les récoltes ne sont pas très bonnes, il y a pénurie, le blé manque. L’hiver 1740 est particulièrement rude, au point que la Seine gèle à Rouen. Le printemps arrive enfin, mais très en retard, jusqu’à provoquer la mort de nombreuses hirondelles, notamment en Région parisienne où certains témoignages décrivent le fléau qui s’abat sur ces oiseaux : « le froid retarde la transformation des insectes qui font leur nourriture, comme la chaleur l’avance ; aussi les voyoit-on tomber aux pieds des passans dans les rues, dans les cours & dans les jardins : les environs de Paris étoient, en certains endroits, jonchés de ces oiseaux morts ou mourants. »

Au XVIIIe siècle on ne sait pas grand chose des hirondelles. Les savants se posent de nombreuses questions, font des expérimentations multiples, les congèlent dans la neige, les noient pour vérifier d’anciennes croyances, observent leur mode de vie, percent les yeux des oisillons pour voir si l’herbe à hirondelle les répare bien comme on le pense alors… Certains se doutent déjà qu’elles migrent en Afrique, les ayant vues au Sénégal à une époque où elles sont absentes d’Europe. « Les Hirondelles restent-elles cachées pendant l’hiver dans les lieux où elles ont pris naissance, jusqu’à ce que le beau tems les fasse reparoître ? Ou vont-elles passer l’hiver dans les pays chauds ? Où se retirent-elles ? Enfin sont elles passageres ? C’est une question qui a été agitée par les Anciens & par les modernes : les uns disent qu’elles se cachent dans les trous des murailles & des arbres ; d’autres qu’elles vont chercher le fond des roseaux ou des étangs, où elles restent comme sans mouvement & sans vie ; d’autres qu’elles passent à l’entrée de l’hiver, dans les pays chauds. Ce qu’il y a de certain, c’est qu’elles disparaissent à l’arrivée des canards sauvages, qui sont également des oiseaux passagers, & qui viennent hiverner chez nous ; mais si c’est le froid qui les chasse de nos climats, il faut donc dire, avec Belon, qu’elles vont en hyver chercher un pays chaud. D’un autre côté, il n’est pas moins certain qu’on en trouve d’engourdies, pendant l’hiver, dans les carrieres, les trous des murailles & des arbres. La contrariété des opinions oblige de suspendre son jugement ; d’autant plus que les observations qu’on a faites à ce sujet, paroissent demander à être vérifiées. »

C’est un sujet qui fait couler beaucoup d’encre en ce temps, et nous qui voyons ces oiseaux toujours posés sur les fils électriques ou téléphoniques, il nous est difficile d’imaginer que cette pratique n’est que le fait d’une adaptation récente. Nos ancêtres du XIXe siècle, quant à eux, les voyaient « assez souvent posées sur les toits, les cheminées, les barres de fer, les branches d’arbres et même à terre », observant qu’à « la fin de Septembre, quand le nombre des insectes commence à diminuer, ces hirondelles se disposent à émigrer et s’assemblent sur de grands arbres, au nombre de trois ou quatre cents ».

En ce printemps 2009, des signes évidents montrent que dans notre commune la population d’hirondelles rentrées de migration a largement chuté. Nids abandonnés, oiseaux peu visibles, le constat est plutôt pessimiste. On considérait déjà en 2002 que l’effectif européen d’hirondelles avait diminué de 20 à 50 % par rapport aux années 70.

Bibliographie :
Dictionnaire raisonné universel d’histoire naturelle, Jacques-Christophe Valmont de Bomare, 1764
Dictionnaire des sciences naturelles, Frédéric Cuvier, 1821

Souvenirs de Table

Posted: 10th February 2012 by admin in Art
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Une Société Fonctionnelle

Posted: 18th November 2010 by admin in Art
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Les explications me semblent superflues ici. Dans le genre chaîne alimentaire, les sociétés humaines ne diffèrent guère du monde animal sinon qu’ici tout homme ou femme possède un peu de ce pouvoir de nuisance, proportionnellement au statut hiérarchique qu’il ou qu’elle occupe.

Pourquoi utiliser un carré plutôt que la pyramide communément employée ? Parce que le carré représente ce qui est immuable, figé…