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Voici un texte sur lequel j’avais travaillé il y a un bout de temps, mais qui visiblement était hors sujet. Dommage.

Entre 1738 et 1744 les récoltes ne sont pas très bonnes, il y a pénurie, le blé manque. L’hiver 1740 est particulièrement rude, au point que la Seine gèle à Rouen. Le printemps arrive enfin, mais très en retard, jusqu’à provoquer la mort de nombreuses hirondelles, notamment en Région parisienne où certains témoignages décrivent le fléau qui s’abat sur ces oiseaux : « le froid retarde la transformation des insectes qui font leur nourriture, comme la chaleur l’avance ; aussi les voyoit-on tomber aux pieds des passans dans les rues, dans les cours & dans les jardins : les environs de Paris étoient, en certains endroits, jonchés de ces oiseaux morts ou mourants. »

Au XVIIIe siècle on ne sait pas grand chose des hirondelles. Les savants se posent de nombreuses questions, font des expérimentations multiples, les congèlent dans la neige, les noient pour vérifier d’anciennes croyances, observent leur mode de vie, percent les yeux des oisillons pour voir si l’herbe à hirondelle les répare bien comme on le pense alors… Certains se doutent déjà qu’elles migrent en Afrique, les ayant vues au Sénégal à une époque où elles sont absentes d’Europe. « Les Hirondelles restent-elles cachées pendant l’hiver dans les lieux où elles ont pris naissance, jusqu’à ce que le beau tems les fasse reparoître ? Ou vont-elles passer l’hiver dans les pays chauds ? Où se retirent-elles ? Enfin sont elles passageres ? C’est une question qui a été agitée par les Anciens & par les modernes : les uns disent qu’elles se cachent dans les trous des murailles & des arbres ; d’autres qu’elles vont chercher le fond des roseaux ou des étangs, où elles restent comme sans mouvement & sans vie ; d’autres qu’elles passent à l’entrée de l’hiver, dans les pays chauds. Ce qu’il y a de certain, c’est qu’elles disparaissent à l’arrivée des canards sauvages, qui sont également des oiseaux passagers, & qui viennent hiverner chez nous ; mais si c’est le froid qui les chasse de nos climats, il faut donc dire, avec Belon, qu’elles vont en hyver chercher un pays chaud. D’un autre côté, il n’est pas moins certain qu’on en trouve d’engourdies, pendant l’hiver, dans les carrieres, les trous des murailles & des arbres. La contrariété des opinions oblige de suspendre son jugement ; d’autant plus que les observations qu’on a faites à ce sujet, paroissent demander à être vérifiées. »

C’est un sujet qui fait couler beaucoup d’encre en ce temps, et nous qui voyons ces oiseaux toujours posés sur les fils électriques ou téléphoniques, il nous est difficile d’imaginer que cette pratique n’est que le fait d’une adaptation récente. Nos ancêtres du XIXe siècle, quant à eux, les voyaient « assez souvent posées sur les toits, les cheminées, les barres de fer, les branches d’arbres et même à terre », observant qu’à « la fin de Septembre, quand le nombre des insectes commence à diminuer, ces hirondelles se disposent à émigrer et s’assemblent sur de grands arbres, au nombre de trois ou quatre cents ».

En ce printemps 2009, des signes évidents montrent que dans notre commune la population d’hirondelles rentrées de migration a largement chuté. Nids abandonnés, oiseaux peu visibles, le constat est plutôt pessimiste. On considérait déjà en 2002 que l’effectif européen d’hirondelles avait diminué de 20 à 50 % par rapport aux années 70.

Bibliographie :
Dictionnaire raisonné universel d’histoire naturelle, Jacques-Christophe Valmont de Bomare, 1764
Dictionnaire des sciences naturelles, Frédéric Cuvier, 1821

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